Thursday, May 23, 2019

Île Ronde : sanctuaire pour la biodiversité



L'île Ronde est un espace de 219 hectares, situé à 22 km au nord de Maurice. Elle est réputée dans le monde entier pour la diversité de ses espèces menacées. Il n'y a pas eu de développement sur l'île dans le passé mais des herbivores non-indigènes tels que des chèvres et des lapins ont été introduits et ont presque détruit la forêt. La conservation et la restauration écologiques de l'île Ronde se font à travers une collaboration entre la Mauritian Wildlife Foundation, le ministère de l'Agro-industrie et de la sécurité alimentaire et Durrell Wildlife Conservation Trust.
Phil Lambdon, écologiste de la restauration des plantes de Durrell Wildlife Conservation Trust, souligne que «l'île Ronde est l'un des habitats les plus riches en faune endémique de Maurice». Les reptiles tels que le boa de l'île Ronde (Casarea dussumieri) et le scinque de Telfair (Leiolopisma telfairii) sont les habitants les plus connus. Les plantes, comme le palmiste bouteille (Hyophorbe lagenicaulis) et les oiseaux marins tels que le paille-en-queue, le fouquet et le pétrel dépendent également de cette île volcanique.

Ci-dessus, deux photos prises au même endroit mais à des années différentes, à gauche en 2004 et à droite en 2018. À côté, on se rend compte de l'attention qu'il faut accorder à la replantation sur l'île Ronde.
L'écologiste raconte que dans les années 70, les perspectives étaient sombres pour ces espèces. Les chèvres et les lapins, introduits au début des années 1800, avaient presque rasé l'île jusqu'à en faire un terrain vague, avec très peu de végétation restante. L'érosion avait enlevé une grande partie du sol et les reptiles étaient privés de nourriture et d'habitat. Le boa enfouis- seur de l'île Ronde (Bolyeria multoca- rinata), un serpent unique au monde qui menait une existence partiellement souterraine, a été perdu à tout jamais, tandis que d'autres étaient sur le point de disparaître.
«La situation tragique de l'île Ronde a suscité beaucoup d'inquiétude au niveau international et, grâce aux efforts concertés de nombreux biologistes en conservation, la situation s'est lentement transformée en une histoire à succès», déclare-t-il.
Des plans de sauvetage ont été élaborés par un consortium composé de la Mauritian Wildlife Foundation, du National Parks and Conservation Service, Forestry Service, du Department of Conservation de Nouvelle-Zélande et du Durrell Wildlife Conservation Trust du Royaume-Uni.
Il annonce que les chèvres et les lapins ont été éradiqués. Ensuite, le pro- cessus laborieux de végétalisation a commencé. Quelques espèces, telles que le latanier bleu (Latania loddigesii), avaient encore suffisamment de graines dormantes dans le sol pour pouvoir re- venir naturellement, mais la plus grande partie de la végétation devait être cultivée dans une petite pépinière improvisée et replantée dans la nature. Il mentionne que plus de 30 000 arbres et arbustes ont été plantés au cours des deux dernières décennies sur l'île.
Espèces difficiles à cultiver
Phil Lambdon explique qu'«autrefois, les expéditions duraient environ une se- maine sous des tentes et ne permettaient pas un bon suivi des plantes mises en terre. En 2002, une station a été construite pour loger le personnel afin qu'il puisse s'occuper des plants quotidiennement».
Un arbre peut prendre jusqu'à deux ans pour se développer pleinement à partir d'une graine, puis doit être transporté avec soin vers des sites appropriés. Une fois plantés, ils sont désherbés et arrosés chaque semaine pendant un an ou plus. L'un des plus gros problèmes, selon lui, était les conditions sèches et inhospitalières. Beaucoup sont morts inévitablement, mais ceux qui ont survécu sont aujourd'hui des arbres matures en bonne santé. «L'île est redevenue verte et n'est plus aussi désertique qu'avant. Les espèces mena- cées prospèrent», annonce-t-il.
Cependant, tous les problèmes n'ont pas été résolus. Phil Lambdon déclare que certaines des espèces les plus importantes sont difficiles à culti- ver. Avec tant de plantes, ce n'était pas évident de répertorier la situation. En 2018, la Fondation Mohammed Bin Zayed a financé un projet pour dresser un bilan scientifique permettant de restaurer plus efficacement, en particulier, le Bois d'ébène blanc (Diospyros egrettarum).
Grâce à ce nouveau bilan, nous avons maintenant une idée des pro- grès. Le latanier bleu a été multiplié par dix depuis 1980. Il y a 186 palmistes bouteille de plus d'un mètre de haut, alors qu'il n'en restait que six. Outre les palmiers, l'île compte aujourd'hui 10 434 autres arbres et arbustes endémiques et indigènes de 40 espèces différentes telles que Bois benzoin (Terminalia bentzoë), Bois clou (Eugenia lu- cida) et le Fangame (Stillingia lineata).
Chaque année, durant la saison de pluie, plus d'un millier de plantes endémiques et indigènes sont mises en terre. Sur la liste pour la présente année, on compte 22 espèces de plus de 1000 plantes, y compris plus de 250 nouvelles plantules de bois d'ébène blanc, qui seront plantées d'ici fin mai.
Au dire de Martine Goder de la Mauritian Wildlife Foundation, ces es- pèces sont importantes pour le bon équilibre de notre écosystème insulaire. Les animaux dépendent de ces plantes pour leur nourriture et leur abri. «Aujourd'hui, Maurice compte moins de 2 % de forêt indigène en raison de la déforestation et la forêt restante est menacée par des espèces végétales envahissantes.»


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